Les Decennalia donnaient lieu à des célébration mémorables et extraordinaires. Quelques textes antiques s’en font l’écho et nous permettent d’imaginer l’ambiance qui régnait alors à Rome.
À propos des célébrations des dix ans de Septime Sévère
Les Decennalia de Septime Sévère sont celles que nous connaissons le mieux, grâce à Dion Cassius (LXXVI, 1), qui rapporte que :

A l’occasion du dixième anniversaire de son règne, [il] fit don à la multitude qui recevait du blé de l’État, ainsi qu’aux soldats prétoriens, d’autant d’aurei qu’il y avait d’années qu’il était au pouvoir. Ce fut pour lui une occasion de montrer la grandeur de sa vanité ; personne n’avait, en vérité, tant donné à tous à la fois ; car cinquante millions de drachmes furent dépensés pour ce don. […] Il y eut aussi alors des spectacles de toute sorte, à l’occasion […] de la dixième année de son règne […]. Dans ces jeux, luttèrent entre eux […] soixante sangliers appartenant à Plautianus ; on y égorgea quantité d’autres bêtes, ainsi qu’un éléphant et un crocotta […]. La cage entière, construite dans l’amphithéâtre en forme de vaisseau, de manière à recevoir quatre cents bêtes et à les lâcher tout d’un coup, s’étant subitement ouverte, il s’en élança des ours, des lionnes, des panthères, des lions, des autruches, des onagres, des bisons (espèce de boeuf barbare de nature et d’aspect), en sorte qu’on vit courir à la fois et égorger tous les sept cents animaux, tant sauvages et domestiques ; car leur nombre, en raison des sept jours que dura la fête, se monta à sept cents.
À propos des célébrations des dix ans de Gallien
L’Histoire Auguste, faux recueil de biographies d’empereurs d’Hadrien à Carin censées être rassemblées au début du IVè siècle mais en réalité rédigées par un auteur unique à la fin du IVè siècle, raconte longuement la procession qui aurait soi-disant eu lieu à Rome pour les Decennalia de Gallien. L’auteur, chrétien, veut montrer le ridicule et la démesure de cet empereur, peu apprécié de ses coreligionnaires pour les persécutions qu’il a organisées. Comme les codiconautes sont parfois galliénistes, nous ne pouvions pas vous le passer sous silence. Voici ce qui est raconté :

Après le massacre des soldats de Byzance, Gallien, comme s’il eût fait quelque grand exploit, courut à Rome, convoqua les sénateurs, et célébra la dixième année de son empire par des jeux, des plaisirs d’un nouveau genre, et des fêtes d’une magnificence inouïe.
VIII. Et d’abord, au milieu des sénateurs en toges, de l’ordre des chevaliers, des soldats vêtus de blanc, et précédé de tout le peuple, de presque tous les esclaves, et des femmes qui portaient à la main des flambeaux de cire et des lampes, Gallien se rendit au Capitole. A droite et à gauche s’avançaient aussi en procession deux par deux, cent bœuf blancs, les cornes dorées, et le dos couvert de riches housses de soie de diverses couleurs: en avant de ces bœufs marchaient deux cents brebis blanches sur deux lignes, et dix éléphants qui se trouvaient alors à Rome; douze cents gladiateurs magnifiquement vêtus de robes étincelantes d’or, telles qu’en portent les dames romaines; deux cents bêtes féroces de divers genres que l’on avait apprivoisées, couvertes des plus riches ornements; des chars avec des mimes et des histrions de toutes sortes; des athlètes qui, armés de cestes inoffensifs, simulaient des combats de pugilat. Il y avait aussi des saltimbanques qui représentaient diverses scènes du Cyclope, et excitaient l’étonnement et l’admiration par les choses merveilleuses qu’ils faisaient. Toutes les rues retentissaient du bruit des jeux et des applaudissements de la foule. Quant à lui, vêtu d’une toge brodée et d’une tunique ornée de palmes, environné des sénateurs, comme nous l’avons dit, et de tous les prêtres revêtus de la prétexte, il se rendit au Capitole. Des deux côtés l’on voyait s’avancer cinq cents lances dorées, et cent étendards, sans compter ceux des différentes corporations de la ville, et, en outre, les dragons et les enseignes de tous tes temples et de toutes les légions. Enfin diverses nations y étaient représentées, comme les Goths, les Sarmates, les Francs, les Perses, et il n’y avait pas moins de deux cents hommes par bande.
Bibliographie
- Dion Cassius, Histoire Romaine, livre LXXVI
- Histoire Auguste, tome 4, 2e partie : Vies des deux Valériens et des deux Galliens